Apprentissage actif

Une mĂ©taphore courante de l’enseignement traditionnel dĂ©crit les Ă©tudiantes et les Ă©tudiants comme des rĂ©cipients vides que l’enseignant·e remplit de connaissances. Toutefois, depuis quelques dĂ©cennies, les recherches sur l’éducation ont montrĂ© que l’apprentissage est un processus actif effectuĂ© par l’apprenant·e, par lequel chacun construit sa propre comprĂ©hension en la reliant Ă  ses connaissances et expĂ©riences prĂ©existantes. Les enseignant·es peuvent donc mieux favoriser l’apprentissage en crĂ©ant des occasions pour les Ă©tudiant·es d’interagir activement avec le nouveau contenu, pour ainsi construire les modĂšles mentaux par eux-mĂȘmes. En d’autres termes, ce que vous faites dans un cours est certes important, mais c’est ce que font vos Ă©tudiant·es qui est dĂ©terminant.

Il a plusieurs dĂ©finitions de l’apprentissage actif, toutes axĂ©es sur l’idĂ©e que les Ă©tudiantes et les Ă©tudiants sont activement impliquĂ©s dans le contenu pendant la durĂ©e du cours en lisant, en Ă©crivant, en parlant ou en rĂ©flĂ©chissant. Le mot « actif Â» dans « apprentissage actif Â» fait rĂ©fĂ©rence Ă  l’activitĂ© et Ă  l’engagement cognitifs, et non aux activitĂ©s physiques ou sociales (bien que celles-ci puissent contribuer Ă  l’apprentissage actif). 

Les chercheuses et chercheurs en Ă©ducation dĂ©finissent gĂ©nĂ©ralement « l’apprentissage actif Â» comme une mĂ©thode qui exige des Ă©tudiant·es qu’elles et ils s’engagent cognitivement et de maniĂšre signifiante avec les ressources pĂ©dagogiques, et qu’elles et ils « interagissent avec les informations prĂ©sentĂ©es et y rĂ©flĂ©chissent rĂ©ellement (analyser, synthĂ©tiser, Ă©valuer) plutĂŽt que de les recevoir passivement Â». (Chi & Wylie 2014, 219)

De nombreuses Ă©tudes ont cherchĂ© Ă  analyser les effets des stratĂ©gies d’apprentissage actif sur les gains de connaissances des Ă©tudiantes et des Ă©tudiants des classes de premier cycle. Une mĂ©ta-analyse de 225 Ă©tudes a montrĂ© que, par rapport aux cours traditionnels, les Ă©tudiant·es qui ont reçu un enseignement utilisant des mĂ©thodes d’apprentissage actif ont obtenu de meilleurs rĂ©sultats aux examens et ont eu un taux d’échec plus faible (Freeman et. al., 2014). Ces mĂȘmes rĂ©sultats ont Ă©galement Ă©tĂ© constatĂ©s dans plusieurs disciplines, notamment la physique, les mathĂ©matiques, la chimie et l’ingĂ©nierie. D’autres analyses et mĂ©ta-analyses ont rĂ©vĂ©lĂ© des constats similaires (Fagen et al., 2002 ; Prince, 2004 ; Ruiz-Primo et al., 2011).

Outre l’augmentation des gains de connaissances, il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que l’apprentissage actif contribue Ă  promouvoir l’inclusion dans la classe. Il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que ces mĂ©thodes profitent d’autant plus aux Ă©tudiantes et Ă©tudiants sous-reprĂ©sentĂ©s et/ou dĂ©favorisĂ©s sur le plan Ă©ducatif et Ă©conomique (Haak et al., 2011). Lorenzo, Crouch et Mazur (2006) ont Ă©galement constatĂ© que si les stratĂ©gies d’apprentissage actif dans les cours de physique amĂ©lioraient les performances des Ă©tudiant·es en gĂ©nĂ©ral, elles avaient des effets beaucoup plus importants sur les performances des Ă©tudiantes. Dans certains cours oĂč une grande partie de l’apprentissage faisait appel Ă  des stratĂ©gies actives, les disparitĂ©s entre les genres ont Ă©tĂ© Ă©liminĂ©es. 

Il existe un certain nombre de stratĂ©gies d’apprentissage actif que vous pouvez utiliser pour amĂ©liorer les gains de connaissances de vos Ă©tudiant·es. Cependant, s’il est bon de commencer petit, il est encore mieux de commencer tout de suite. Choisissez les techniques les plus simples Ă  mesure que vous dĂ©veloppez vos compĂ©tences et votre confiance. Lorsque vous commencerez Ă  les intĂ©grer, il sera bon d’expliquer Ă  vos Ă©tudiant·es ce que vous ĂȘtes en train de faire et pourquoi. Cela les aidera Ă  s’impliquer davantage dans leur apprentissage (compĂ©tences mĂ©tacognitives) et contribuera Ă  crĂ©er une classe solidaire et engagĂ©e. 

Dans les sections qui suivent, nous allons aborder certaines des méthodes que vous pouvez utiliser.

La classe inversĂ©e est une stratĂ©gie d’apprentissage actif et hybride. En classe inversĂ©e, les Ă©tudiantes et les Ă©tudiants sont exposĂ©s au contenu (lectures/vidĂ©os) Ă  la maison. Pendant le cours, elles et ils approfondissent leur maĂźtrise en appliquant ce qui a Ă©tĂ© appris (par exemple, par la rĂ©solution interactive de problĂšmes). La pandĂ©mie de Covid-19 a obligĂ© la plupart des membres du corps enseignant Ă  inverser leurs cours dans une certaine mesure, en utilisant diverses combinaisons de vidĂ©os prĂ©enregistrĂ©es disponibles de maniĂšre asynchrone et des interactions proches de celles faites en classe avec les Ă©tudiant·es, Ă  distance ou en personne.

Pour beaucoup d’enseignant·es de l’EPFL, il s’agissait de leur premiĂšre exposition directe au modĂšle de la classe inversĂ©e. Cependant, diverses Ă©tudes, dont certaines faites sur des cours de l’EPFL, ont prouvĂ© que lorsque l’approche traditionnelle est « inversĂ©e Â», et que « l’enseignant·e Â» devient « une facilitatrice ou un facilitateur d’apprentissage Â», les acquis de formation s’amĂ©liorent. Ceci a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© dans un certain nombre de disciplines, y compris les STEM (Sciences, Technology, Engineering and Mathematics). Une Ă©tude rĂ©cente Ă  l’EPFL a montrĂ© que les classes inversĂ©es pouvaient contribuer Ă  rĂ©duire les Ă©carts de performance entre les diffĂ©rentes catĂ©gories dĂ©mographiques d’étudiant·es et donc Ă  rendre l’apprentissage plus Ă©galitaire. 

De nombreux enseignantes et enseignants de l’EPFL ont dĂ©clarĂ© vouloir conserver certains Ă©lĂ©ments d’apprentissage hybride qu’elles et ils ont adoptĂ©s et adaptĂ©s pendant la pĂ©riode d’enseignement Ă  distance forcĂ©, en raison des impacts positifs sur les rĂ©sultats et la rĂ©ussite de leurs Ă©tudiant·es.

Choisissez votre stratĂ©gie en fonction de vos besoins (et de ceux de vos Ă©tudiant·es). Il n’existe pas de modĂšle unique de classe inversĂ©e. Il s’agit plutĂŽt d’un continuum entre l’enseignement traditionnel et la classe complĂštement inversĂ©e. Une rĂ©flexion et une planification minutieuses sont essentielles Ă  la rĂ©ussite d’une expĂ©rience « d’inversement ».

Le feedback est un élément important. Préparez les outils dont vous aurez besoin pour recueillir des informations sur les progrÚs de vos étudiant·es, ainsi que la structure que vous utiliserez pour donner à ces derniers un feedback exploitable.

Faites attention Ă  la charge de travail de vos Ă©tudiantes et Ă©tudiants. Il est important de planifier soigneusement pour s’assurer qu’elles et ils ne soient pas submergĂ©s par la nĂ©cessitĂ© de prĂ©parer, d’assister au « cours Â» et ensuite de faire leurs devoirs. Les enseignant·es (et parfois mĂȘme les Ă©tudiant·es) peuvent sous-estimer le temps nĂ©cessaire pour suivre un cours inversĂ©.

Il existe de nombreuses stratĂ©gies d’apprentissage actif que vous pouvez personnaliser pour rĂ©pondre aux besoins spĂ©cifiques de votre cours. Vous trouverez ci-dessous une liste non exhaustive de certaines de ces techniques :

  1. Pause : AprĂšs environ 15 minutes de cours, donnez Ă  vos Ă©tudiant·es 2 minutes pour revoir leurs notes. Invitez-les Ă  Ă©crire leurs Ă©ventuelles questions, Ă  souligner la terminologie qui ne leur paraĂźt pas claire ou Ă  ajouter des informations complĂ©mentaires utiles Ă  leur comprĂ©hension. L’objectif est de leur donner le temps d’intĂ©grer activement les nouvelles informations et de les prĂ©parer Ă  l’étape suivante. 
  2. PossibilitĂ© de poser des questions : À certains moments prĂ©cis de votre cours, faites une pause et donnez Ă  vos Ă©tudiant·es la possibilitĂ© de poser des questions. Si les Ă©tudiantes et les Ă©tudiants semblent rĂ©ticents Ă  cet exercice en classe, vous pouvez utiliser l’application SpeakUp qui leur permet de transmettre leurs questions via internet de maniĂšre anonyme et temporaire. Cette application leur permet Ă©galement de voter pour les questions les plus intĂ©ressantes posĂ©es par leurs camarades. Vous pouvez prendre quelques minutes pendant un cours pour traiter les questions les plus populaires de la semaine.
  3. Petit-papier : À la fin de chaque cours, demandez aux Ă©tudiant·es de prendre une minute et d’écrire leur rĂ©ponse Ă  une question spĂ©cifique sur un papier (cela peut ĂȘtre liĂ© Ă  un sujet complexe abordĂ© ce jour-lĂ  ou pour Ă©valuer leur niveau de connaissances sur un sujet Ă  venir). La rĂ©colte des rĂ©ponses anonymes vous fournit un retour immĂ©diat sur leur niveau de comprĂ©hension et la nature de leurs difficultĂ©s.
  4. Outils de sondage interactifs: Sondez les Ă©tudiant·es en temps rĂ©el avec de petits boĂźtiers ou une application sur leur appareil mobile. Utilisez les rĂ©sultats prĂ©sentĂ©s dans les histogrammes gĂ©nĂ©rĂ©s automatiquement pour stimuler la discussion et sonder le raisonnement des Ă©tudiant·es. Pour plus d’informations, veuillez consulter la page Enseigner avec des outils interactifs. 
  5. Penser-Comparer-Partager : Lorsqu’une question ou un problĂšme est posĂ©, chaque Ă©tudiante ou Ă©tudiant doit d’abord y PENSER seul (elles et ils peuvent Ă©crire leur rĂ©ponse). Puis, elles et ils se mettent en binĂŽme avec une voisine ou un voisin pour Ă©changer et trouver une rĂ©ponse commune (COMPARER). Pour conclure, vous pouvez demander Ă  quelques binĂŽmes de PARTAGER leurs rĂ©ponses avec toute la classe (ou avec un autre binĂŽme). Cette stratĂ©gie permet de rĂ©duire les difficultĂ©s de participation grĂące Ă  un temps de rĂ©flexion intĂ©grĂ© et donne aux Ă©tudiant·es la possibilitĂ© de vĂ©rifier et d’affiner leur rĂ©ponse avant de la partager. Il s’agit d’une stratĂ©gie particuliĂšrement utile pour les personnes qui ne s’expriment pas dans leur langue maternelle.
  6. Feuilles d’activitĂ©s : Élaborer une feuille d’activitĂ©s Ă  utiliser en cours par les Ă©tudiant·es peut les aider Ă  traiter des informations complexes en leur faisant remplir chaque Ă©tape Ă  un moment prĂ©cis du cours. Cela leur permet d’appliquer immĂ©diatement l’information et de l’assimiler. Vous pouvez choisir de faire travailler les Ă©tudiantes et les Ă©tudiants seuls ou avec une voisine ou un voisin : un groupe d’étudiant·es peut gĂ©rer des tĂąches plus complexes et persĂ©vĂšrera plus longtemps.

Pour davantage de soutien vous pouvez envisager de participer Ă  l’atelier « Effective Interactive Teaching Â» ou contacter une conseillĂšre ou un conseiller pĂ©dagogique.

Bien que les ordinateurs portables soient de plus en plus utilisĂ©s pour prendre des notes en cours, il a Ă©tĂ© prouvĂ© que les Ă©tudiant·es apprennent davantage lorsqu’elles et ils prennent des notes Ă  la main (Mueller & Oppenheimer, 2014). Cependant, Ă©tant donnĂ© que le volume et la complexitĂ© du contenu des cours dans l’enseignement supĂ©rieur peuvent rendre difficile la prise de notes manuscrites, vous pouvez encourager ce comportement en mettant Ă  disposition de vos Ă©tudiant·es certains outils et stratĂ©gies. 

  • Donnez un aperçu/un plan du cours du jour. Faites explicitement part aux Ă©tudiant·es de la logique que vous avez suivie pour structurer le cours et donnez-leur un aperçu du cours du jour pour leur permettre d’organiser leurs notes.
  • Concevez des polycopiĂ©s structurĂ©s pour permettre aux Ă©tudiant·es d’ajouter des informations supplĂ©mentaires, car la qualitĂ© de la prise de notes exige d’avoir suffisamment de place pour consigner des notes claires et bien organisĂ©es. Le CEDE peut aussi vous aider crĂ©er des supports de cours destinĂ©s Ă  la prise de notes.
  • Encouragez les Ă©tudiant·es Ă  utiliser des mĂ©thodes de prise de notes actives (en utilisant leurs propres mots, en identifiant des liens entre les sujets, en griffonnant toutes leurs Ă©ventuelles questions ou en soulignant les passages qui ne sont pas clairs) plutĂŽt que passives (en soulignant des mots ou en retranscrivant le cours mot pour mot).
  • Initiez les Ă©tudiant·es Ă  diffĂ©rents systĂšmes de prise de notes, tels que la mĂ©thode Cornell ou la technique du Mindmapping, en les encourageant Ă  les tester pour trouver celui qui leur convient le mieux (une intĂ©ressante page sur le site d’Oxford en prĂ©sente plusieurs). Suivant les cours, certaines de ces approches seront plus adaptĂ©es que d’autres, mais dans tous les cas il est utile pour les Ă©tudiant·es d’élaborer des abrĂ©viations et de prendre l’habitude de laisser beaucoup d’espace dans leurs notes pour permettre des modifications ou ajouts ultĂ©rieurs.