ENSEIGNEMENT

Albers et ses Ă©tudiants – Bauhaus, Dessau 1928

L’objectif principal des cours du laboratoire LAPIS est de donner aux Ă©tudiants des outils qui leur permettent de dĂ©finir et transmettre une idĂ©e d’architecture dans son expression concrĂšte. L’enseignement transmet les fondements thĂ©oriques et introduit les techniques opĂ©ratoires. Ce rĂ©sultat peut ĂȘtre obtenu par une connaissance scientifique de l’histoire de l’art et, de maniĂšre parallĂšle et indissociable, par une pratique continue des outils de la figuration expressive et l’investigation des moyens de reprĂ©sentation numĂ©riques, analogiques et manuels.

FIRE

Théorie et techniques de la figuration architecturale

ATELIER

Théorie et critique du projet / Atelier Braghieri

VETU

Visions et utopies

SEMAINE ENAC

Habitat humain : Ă©tude sur le territoire alpin

RELEVÉ

Figuration et reprĂ©sentation de l’architecture

ARKÉ

Introduction Ă  l’archĂ©ologie de la construction

FIGU

Figuration graphique

GRAPH

Graphie

PDM

Projets de master

La Gestaltung est l’une des bases fondamentales de l’enseignement de l’architecture. C’est une discipline qui Ă©tudie l’expression de la « forme », la mise en scĂšne d’une idĂ©e ou d’un concept. Selon le principe de la Gestaltung, le tout est autre chose que la somme des parties ; un ensemble de formes n’est pas l’addition des formes qui le composent, mais une autre forme Ă  part entiĂšre. Cet axiome, qui exprime un concept anti-mathĂ©matique, dĂ©finit une dimension Ă  la limite des champs scientifique et objectif oĂč l’objet rĂ©el, l’entitĂ© physique, perd de son importance au profit de l’idĂ©e gĂ©nĂ©rale de sa perception. C’est la dimension Ă©motionnelle et culturelle qui imprĂšgne la matiĂšre physique d’une Ɠuvre architecturale. Dans le domaine de la reprĂ©sentation, cette dimension se manifeste par la capacitĂ© d’expression au travers de l’art de la figuration. Un art qui permet de transfĂ©rer donc un nombre d’informations qui dĂ©passe la simple observation d’un objet ainsi que sa dimension fonctionnelle et matĂ©rielle.

De maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, la Gestaltung s’occupe des aspects liĂ©s Ă  la perception, au raisonnement et donc aux bases du comportement, comme les thĂ©ories de la connaissance, la mĂ©moire et la pensĂ©e. Elle Ă©tudie le passage et les relations entre Forme>SchĂ©ma>ReprĂ©sentation. Elle s’applique Ă  dĂ©finir les rĂšgles principales qui permettent d’organiser les donnĂ©es de la perception.

Une partie de l’enseignement de la figuration architecturale s’intĂ©resse aux techniques des beaux-arts manuels et numĂ©riques. Cet enseignement est des plus difficiles puisque la technique de l’artiste a beaucoup de secrets cachĂ©s dans la profondeur de l’ñme. Le style imprimĂ© aux dessins et Ă  l’écriture surgit des idĂ©es et des passions, il se prĂ©cise avec l’expĂ©rience, se sĂ©dimente collectivement et – en particulier pour l’architecture – devient une tradition commune et partagĂ©e pour la communication des idĂ©es. Cette derniĂšre est l’un des objectifs Ă©lĂ©mentaires pour chaque architecte qui veut exprimer efficacement et de maniĂšre cohĂ©rente son travail. C’est pourquoi la capacitĂ© Ă  Ă©tablir une forte cohĂ©rence entre l’idĂ©e et son expression matĂ©rielle, entre la figure et son image, est une qualitĂ© et un motif de satisfaction pour l’architecte. En observant la maniĂšre dont les autres ont su transmettre leurs idĂ©es, on apprend Ă  transmettre les nĂŽtres et Ă  construire un propre langage d’expression.

L’objectif plus Ă©lĂ©mentaire de l’enseignement est d’apprendre Ă  lire les reprĂ©sentations architecturales ; de la simple illustration aux modĂšles plus complexes, de textes Ă©crits ou de photographies. Il s’agit de comprendre la maniĂšre dont les architectes ont essayĂ© de transmettre leurs idĂ©es d’architecture. L’observation des images de projets permettra de chercher le gĂ©nie crĂ©ateur de l’auteur, l’esprit de l’époque, le dĂ©mon protecteur de l’Ɠuvre. On cherchera le lien entre ces diffĂ©rentes entitĂ©s et on apprendra ainsi beaucoup d’histoires et beaucoup de secrets qui se cachent dans les images et derriĂšre les architectures construites. Nous ne serons donc pas seul sur le parcours qui conduit Ă  la construction d’un propre langage d’expression afin d’écrire et dĂ©crire sa propre idĂ©e d’architecture, mais nous serons accompagnĂ©s par beaucoup de maĂźtres et de fantĂŽmes.

Cependant l’objectif principal de l’enseignement de la communication de l’architecture n’est pas de tracer une histoire de l’image architecturale. L’objectif ne fait qu’un avec la mĂ©thode d’enseignement : partager un grand patrimoine iconographique et jeter les bases afin que celui-ci puisse ĂȘtre utile Ă  chacun pour la construction d’un rĂ©pertoire personnel. Seul la connaissance d’un riche patrimoine iconographique peut permettre la construction d’une propre expression individuelle, indĂ©pendante et autonome.

ReprĂ©senter de maniĂšre cohĂ©rente les idĂ©es et communiquer de maniĂšre efficace le projet sont des activitĂ©s fondamentales pour chaque architecte. Le dessin, la peinture, la photographie, la modĂ©lisation, l’art graphique, sont des modalitĂ©s opĂ©rationnelles du projet d’architecture et deviennent des instruments didactiques pour le dĂ©veloppement des talents individuels. La personnalitĂ© d’un architecte se forme de maniĂšre dialectique au travers de l’expĂ©rimentation collective des techniques artistiques pour interprĂ©ter la rĂ©alitĂ© et pour transmettre les idĂ©es.
L’interaction avec la recherche et la didactique des autres disciplines doit se baser sur les potentialitĂ©s mĂ©thodologiques de la reprĂ©sentation Ă  l’intĂ©rieur du processus gĂ©nĂ©ral du projet d’architecture.
Il ne faut pas considĂ©rer le dessin, la peinture, la photographie, la modĂ©lisation et l’art graphique, comme des disciplines accessoires Ă  la « prĂ©sentation » du projet d’architecture, mais plutĂŽt comme des instruments et des modalitĂ©s de la « reprĂ©sentation » de l’idĂ©e d’architecture. De cette maniĂšre les disciplines artistiques assument le rĂŽle de processus et mĂ©thode de composition du projet et participent pleinement Ă  la formation de la personnalitĂ© complĂšte de l’architecte.
La reprĂ©sentation est un processus complexe qui commence avec la conception d’une idĂ©e, traverse le stade de la production matĂ©rielle, dĂ©finit sa forme concrĂšte et lui donne une signification symbolique. La signification symbolique est liĂ©e au fait que la reprĂ©sentation est une allĂ©gorie de l’idĂ©e, elle communique une signification qui va au-delĂ  de la simple image reproduite sur un support. La reprĂ©sentation d’un objet ou d’un concept induit Ă  la rĂ©flexion sur la nature des choses et oblige la mise Ă  l’épreuve de l’efficacitĂ© des idĂ©es, elle remplit l’espace entre le monde des idĂ©es et le monde de la matiĂšre corporelle. L’état actuel des technologies virtuelles et la rĂ©vision radicale des techniques d’expression dans l’art contemporain rendent impossible toute division traditionnelle des arts expressifs selon des disciplines distinctes et induisent donc une reconsidĂ©ration de leurs rĂŽles Ă  l’intĂ©rieur du projet d’architecture.

La formation d’un processus crĂ©atif personnel n’est pas conduite vers la stimulation de gestes instinctifs, mais plutĂŽt vers la dĂ©finition d’une mĂ©thode de reprĂ©sentation transmissible. L’utilisation des diffĂ©rentes disciplines et techniques doit s’accomplir spontanĂ©ment et indistinctement, leur interaction doit pouvoir favoriser la prĂ©dominance de la capacitĂ© d’expression gĂ©nĂ©rale plutĂŽt que l’habiletĂ© technique particuliĂšre. L’objectif consiste Ă  conduire vers la formation d’une technique expressive personnelle qui soit cohĂ©rente Ă  la fois avec l’objet spĂ©cifique de la reprĂ©sentation et avec la propre vision gĂ©nĂ©rale. L’enseignement se propose de guider Ă  l’acquisition de connaissances de base tout en laissant libre cours Ă  la formation « autodidacte » et, donc, de soulager le parcours formateur de notions induites pour favoriser l’expĂ©rimentation de techniques d’expression individuelles. L’objectif de l’enseignement est aussi d’introduire l’utilisation de conventions afin qu’une idĂ©e d’architecture puisse ĂȘtre transmise et partagĂ©e. Il s’agit de transmettre les outils nĂ©cessaires afin de maĂźtriser et de manipuler les logiques et les conventions graphiques d’usage courant. L’architecte a l’opportunitĂ© de transmettre les idĂ©es de son univers personnel sans perdre de vue la cohĂ©rence avec le projet, mais il se doit aussi de transmettre des informations objectives afin qu’il puisse ĂȘtre compris. Le rĂŽle pour l’enseignement de la reprĂ©sentation de l’architecture est Ă  la fois de plier les techniques aux processus d’expression et de faire Ă©voluer ces derniers Ă  l’aide des mĂȘmes techniques.

La reprĂ©sentation de l’architecture veut concrĂ©tiser la pensĂ©e, les rĂȘves et les visions imaginaires. Elle traduit le premier passage du monde des idĂ©es, qui du point de vue technique sont des entitĂ©s irrĂ©elles, au monde des objets, qui sont des entitĂ©s directement vĂ©rifiables. Le champ d’action de la reprĂ©sentation de l’architecture demeure Ă  mi-chemin entre rĂ©el et imaginaire, dans le domaine du « vraisemblable ». L’enseignement de la reprĂ©sentation de l’architecture veut donc stimuler l’utilisation d’outils manuels et numĂ©riques au travers des limites extrĂȘmes du jeu entre rĂ©alitĂ© et fiction. Un jeu qui inverse les proportions entre rĂ©alitĂ© et fiction et donc plus le sujet de la reprĂ©sentation est « absurde », plus les modalitĂ©s de la figuration doivent s’efforcer de rendre les objets rĂ©els. Ce travail sur le paradoxe met en relief le pouvoir dialectique et rhĂ©torique de l’architecture. Le dessin pourra ainsi « raconter » non seulement le projet spĂ©cifique, mais surtout l’atmosphĂšre du milieu, du rĂȘve et de la mĂ©moire.