Les calculs hasardeux de Christoph Blocher

Pour soutenir l'argument de l'UDC que son initiative "contre l'immigration de masse" serait favorable à la prospérité, le conseiller national Christoph Blocher a calculé que le produit intérieur brut (PIB) par habitant avait augmenté de 9.2% entre 2002 et 2007, avant la pleine entrée en vigueur de l'accord de libre circulation des personnes avec l'UE et que dans les 5 années suivantes il avait chuté à 1.8%. 9.2% par an! Est-ce que vous vous souvenez encore que votre revenu augmentait de presque 10% par an avant qu'il faille le partager avec 80'000 immigrés par an? Moi pas. En même temps, je n'avais pas placé mes économies chez Madoff. Alors vérifions les chiffres.


En 2002, le PIB rapporté à la population moyenne de l'année se montait à 61'332 francs par personne. En 2007, il se montait à 71'619. Cela fait une progression de 16.8% AU TOTAL sur les 5 ans, soit 3.1% par année. En même temps, les prix ont augmenté de 6.8% sur les 5 ans (déflateur du PIB). En francs constants, le PIB par habitant a donc augmenté de 13.3% entre 2002 et 2007, ou 2.5% par an en moyenne.


Faisons maintenant les mêmes calculs pour la période 2007-2012, une période de cinq ans au cours de laquelle la population résidant en Suisse a augmenté de presque 6%. Le PIB par habitant est passé des 71'179 francs par personne à 74'020, soit une progression de 3.4% ou 0.7% par an en moyenne. C'est bien moins, effectivement, qu'au cours des 5 années précédentes, mais l'inflation a aussi bien ralenti. En francs constants, le PIB a augmenté de 6.1% entre 2007 et 2012, ou 1.2% par an en moyenne.


Conclusion: le conseiller national Blocher exagère massivement la croissance que la Suisse a connue avant 2007 et le ralentissement intervenu depuis. Cela dit, il est vrai que le rythme moyen de croissance a été divisé par deux, mais est-ce le fait de la libre-circulation des personnes ou plutôt de l'effondrement de l'économie mondiale après 2007? Les études sérieuses démontrent que la Suisse aurait souffert bien davantage de la crise financière mondiale si la libre circulation n'avait pas amené une main-d'oeuvre très qualifiée et des consommateurs au pouvoir d'achat élevé.