Thèses en cours

Explorer le potentiel de l’expérimentation pour accélérer la transition des mobilités

Matthieu Gautrot – Dir. Vincent Kaufmann & co-dir. Frédéric Varone

Alors que le processus de planification en place aujourd’hui en Europe peinent à adresser les enjeux sociétaux (climatiques, sociaux, sanitaires) en lien avec la mobilité, de plus en plus de travaux pointent l’expérimentation comme un moyen de tester en pratique des moyens d’action, s’éloignant de la planification classique à long terme des infrastructures de transport en proposant un cadre exploratoire plus agile.

Les real world labs ou living labs donnent un cadre à l’expérimentation : ils sont décrits comme des espaces de recherche transdisciplinaire appliquée ayant pour objectif de transformer à long terme certains aspects sociétaux en s’appuyant sur une démarche scientifique et collective et en produisant des résultats réplicables et transférables. 

En profitant de plusieurs expériences menées par la Fondation Modus, œuvrant pour la transition des mobilités sur le Grand Genève, nous proposons d’étudier dans cette thèse de doctorat le potentiel de trois expérimentations concrètes : la récompense de pratiques vertueuses de mobilité (gamification), la mise à disposition d’offres alternatives contre la démotorisation temporaire, ou encore la gratuité des transports publics urbains pour un public cible. Des enquêtes (quantitatives et qualitatives) auprès des participants, des données de tracking GPS ou encore des entretiens auprès des acteurs impliqués dans ces projets permettrons d’évaluer, à l’aide d’une analyse multicritère, tant les effets que la faisabilité de la pérennisation et l’extension de ces leviers d’action dans un second temps.

Ces recherches doivent finalement donner un cadre et des outils standardisés pour concevoir, implémenter, évaluer et accompagner les expérimentations visant à accélérer la transition des mobilités.


De s’abriter à habiter : investir les interstices et faire communauté sur une friche urbaine (provisoire)

Stéphane Huber – Dir. Luca Pattaroni & Hélène Martin (HETSL | HES-SO)

Par le geste d’une ethnographie participante, ce projet de thèse invite à questionner l’expérience et la modalité pratiques que recouvre l’acte d’habiter pour des personnes dénuées de ressources, pour beaucoup sans-papiers et sans domicile fixe, et emprises dans des situations les empêchant d’accéder pleinement aux réseaux institutionnels et sociaux disponibles ordinairement pour le citoyen à part entière. Plus précisément, cette enquête suit une expérimentation collective qui investit des formes créatives de partage et de solidarité, se déployant au sein d’une friche urbaine lausannoise. Cette expérimentation questionne les contours pratiques du travail d’auto-administration et de maintien de soi fourni par le collectif et les implications de cette cohabitation entre des personnes qui font face à diverses épreuves du quotidien, en lien avec les usages qu’ils déploient collectivement au sein de cet espace commun. L’enquête appréhende la ville comme un milieu de vie qui offre des espaces dont certains disposent d’une potentialité d’être investis en vue de s’y ressourcer et d’y réconforter certains usages, ils sont ainsi refigurés ainsi en des « lieux » appropriés et par-là significatifs pour les personnes concernées. En puisant dans une anthropologie du partage et dans l’approche de l’écologie humaine, cette enquête cherche à rendre compte les interrelations entre l’agir pratique des individus et leur milieu de vie en tenant compte de leurs activités ordinaires et quotidiennes. Plus généralement, cette enquête sonde la perméabilité de l’espace urbain et administratif aux contributions citoyennes qui mettent au-devant un faire-ensemble et un vivre-ensemble qualifié par une certaine « débrouillardise » reposant sur l’ingéniosité collective afin de re-qualifier l’environnement et les prises qu’il fournit pour y aménager un espace de vie.


Home-made : anthropologie architecturale du travail basé à domicile en Suisse, à l’époque postmoderne.

Capucine Legrand – Dir. Sophie Delhay & co-dir. Luca Pattaroni

Ancrée dans l’anthropologie architecturale, la recherche vise à étudier les effets – spatiaux et sociaux – du développement des home-based businesses (HBBs) contemporains en Suisse.

Depuis les années 2000, le travail à domicile connaît une forte progression, portée par le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC) et l’émergence de l’économie de plateforme. Ces transformations favorisent l’essor de nouvelles formes d’emploi: travailleurs indépendants, «faux indépendants» ubérisés, télétravailleurs permanents – autant de profils regroupés sous la catégorie des travailleurs basés à domicile, selon la définition de l’Organisation internationale du travail (OIT) (les salariés qui ne télétravaillent qu’occasionnellement en sont exclus). En 2019, le Bureau international du Travail (BIT) estimait ainsi à 260 millions le nombre de travailleurs basés à domicile dans le monde, dont une majorité de femmes. Face à la précarité qui touche ces travailleurs, l’institution fixait alors un objectif clair pour les décennies à venir : passer du “travail invisible” au “travail décent.”

En se focalisant sur le contexte Suisse – marqué par une longue tradition de travail à domicile dans les secteurs de l’horlogerie et du textile -, cette thèse examine les formes contemporaines de travail basé à domicile, dans toute leur diversité. Qu’il s’agisse de la marchandisation d’un hobby, d’une activité complémentaire à un emploi salarié (pluriactivité), d’une pratique informelle (travail marchand non déclaré), d’une activité professionnelle à part entière, ou encore d’une solution temporaire en attendant de trouver un local dédié ; le travail basé à domicile modifie nos perceptions du privé et du public, du productif et du reproductif, du travail et du repos.  Il reconfigure les usages de l’habitat et les structures sociales du voisinage, menant à l’émergence d’une « diffuse house » pour reprendre l’expression d’Anna Puigjaner. Cette notion questionne le modèle urbanistique existant de « ville productive » et en révèle les limites. Elle montre que la production économique contemporaine ne se cantonne plus aux espaces dédiés du travail, mais s’infiltre dans la trame même du quotidien domestique.

En s’appuyant sur des enquêtes ethnographiques de terrain et des études de cas architecturales, la recherche explore les causes et les effets du déplacement du travail vers la sphère domestique. Si le travail à domicile promet flexibilité, gain de temps, réduction des déplacements pendulaires et meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, ces avantages demeurent ambivalents. Ils s’accompagnent souvent de coûts importants pour les travailleurs : isolement professionnel, brouillage des temporalités entre sphères privée et professionnelle, pression spatiale accrue pour les ménages les plus précaires, renforcement des inégalités de genre et essor du travail informel.

Ces constats d’ordre sociologique ouvrent la voie à une lecture typologique renouvelée du logement ans les villes contemporaines. La recherche met en lumière la tension entre assignation et désassignation des espaces domestiques : tandis que la flexibilité postmoderne favorise la réversibilité des espaces et des usages, elle engendre aussi de nouvelles formes de précarité spatiale. Il s’agit alors d’interroger le caractère typologiquement ambigu des habitats productifs contemporains – mêlant espaces adaptables et espaces adaptés. 

Dans ce contexte, la maison tend à devenir un lieu hybride, à la fois intime et exposé, où s’entrelacent activités productives, reproductives et relationnelles. Si cette hybridation témoigne d’une capacité d’adaptation aux mutations du travail, elle s’inscrit surtout dans une trajectoire néolibérale fondée sur l’individualisation, la flexibilisation et la privatisation du lieu de production. Plutôt que d’encourager cette porosité croissante entre vie professionnelle solitaire et vie domestique familiale, la recherche invite à imaginer des formes spatiales et sociales alternatives pour une nouvelleéconomie de voisinage. Ainsi, la recherche propose une critique du paradigme individualisant du travail à domicile et ouvre la voie à une réinvention des liens entre travail, habitat et collectif. En plaçant la solidarité, la mixité des usages et la dimension commune de l’habiter au cœur du projet architectural et urbain, elle esquisse les bases d’une ville plus inclusive, partagée et résiliente face aux transformations contemporaines du travail.


Flexibility as Capital: A Comparative Mixed-Methods Study of Remote Work

Sofía González Jiménez – Dir. Vincent Kaufmann & co-dir. Guillaume Drevon

L’expansion rapide du télétravail depuis la pandémie de COVID-19 a remodelé la manière dont le temps, l’espace et les activités quotidiennes sont organisés. Bien que souvent salué comme un gain de flexibilité, ce changement a également révélé des dynamiques inégales, notamment une division du travail genrée, une charge mentale accrue et des frontières floues entre le travail et la sphère privée. Dans le cadre du projet WinWin4WorkLife Horizon, cette recherche adopte une approche mixte reposant sur des méthodes qualitatives afin de comprendre l’appropriation des modalités de travail à distance (RWA) dans différents contextes. L’analyse s’appuie sur des entretiens approfondis menés dans le cadre de cinq études de cas, tout en s’inspirant des conclusions tirées des données d’enquête et des carnets d’emploi du temps générés dans le cadre du projet plus large. Sur le plan conceptuel, le télétravail est abordé comme une ressource, en examinant comment les individus et les ménages accèdent, mobilisent et s’approprient le télétravail pour réorganiser d’autres dimensions de la vie quotidienne. En retraçant ces processus d’appropriation, l’étude comble les lacunes dans la compréhension des impacts socioculturels du télétravail, en accordant une attention particulière à la satisfaction spatiale, à la gestion du temps, aux pressions systémiques et à la reproduction des inégalités. Cette conception comparative qualitative met en évidence les différentes utilisations du télétravail dans cinq études de cas différentes en Europe (FI, GE, LUX, SL, PT), en réimaginant des environnements de travail à distance durables qui favorisent le bien-être et des conditions de travail et de vie saines.


Mobilités Multiscalaires: vers une sociologie polytechnique du report modal

Clément Rames – Dir. Vincent Kaufmann

Dans un monde frappé de plein fouet par les effets du changement climatique, l’action climatique reste plus urgente que jamais. Le secteur des transports représente environ un cinquième des émissions mondiales de gaz à effet de serre – ces émissions ont doublé depuis 1990 et quadruplé depuis 1970 – remettant en question les discours sur le « développement durable » et les « transition des mobilités ». En effet, le secteur des transports est extrêmement complexe à décarboner, car il est étroitement lié aux pratiques quotidiennes de mobilité de huit milliards d’êtres humains, ainsi qu’à d’immenses infrastructures, à des forces culturelles profondément ancrées et à des intérêts économiques gigantesques.

La transition des mobilités ne peut être envisagée ou comprise qu’à travers une approche multiscalaire. Pourtant, la plupart des études sur la mobilité se sont jusqu’à présent concentrées sur l’une des échelles suivantes: micro – l’échelle de l’individu et de ses pratiques sociales – méso – l’échelle du territoire, du quartier, de la ville, du pays – ou macro – l’échelle globale, celle du système. Cette thèse fait écho à l’appel de Braudel à intégrer l’espace dans la sociologie, le temps dans la géographie et les sciences sociales dans les mathématiques et les statistiques.

Pour ce faire, elle définit un cadre conceptuel simple articulé autour de trois dimensions : le temps, l’espace et le changement social. Trois questions de recherche structurent cette thèse :

  • Q1: Comment les facteurs sociaux et spatiaux influencent-ils les pratiques de mobilité ?
  • Q2 : Quelles « transitions de mobilité » peut-on observer à l’échelle locale et mondiale ?
  • Q3 : Comment activer la transformation au sein du système complexe de la mobilité ?

Les différentes publications appliqueront le cadre conceptuel ci-dessus à l’étude des pratiques de mobilité en transition. Face à l’urgence climatique mondiale, ce cadre permet de tracer des voies prospectives et des leviers d’action vers la décarbonation de la mobilité, tout en tenant compte des pratiques sociales, des caractéristiques locales et de la dynamique des systèmes.


Acceptabilité sociale et changement dans les politiques publiques : la décarbonation des transports à Genève et au Luxembourg

Lucie Palanché – Dir. Vincent Kaufmann & co-dir. Guillaume Drevon

Le transport est un secteur qui joue un rôle majeur dans l’augmentation de notre empreinte carbone, l’enjeu politique est alors de rendre possibles et désirables des modes de transport décarbonés. Cette thèse s’intéresse à l’acceptabilité sociale du changement dans nos pratiques de déplacement et à la transformation des politiques de transport, dans un contexte de crise climatique. L’intérêt de la thèse repose sur l’étude de l’acceptabilité sociale et du changement dans les politiques de transport en relation avec le contexte politique et institutionnel, afin de prendre en compte les dimensions matérielles, mais également juridiques, sociales et politiques du changement. Nous nous intéresserons à la manière dont l’acceptabilité sociale interagit avec différents éléments du contexte politique et institutionnel (modèle politique, politiques publiques, lois et règlements en place, actions collectives, etc.) dans le changement ou l’inertie des politiques de transport. Nous reviendrons sur les facteurs qui ont un impact positif sur l’acceptabilité sociale dans un contexte spécifique. Pour y parvenir, la thèse repose sur la comparaison entre deux régions, le Luxembourg et le Canton de Genève, qui se distinguent par leur modèle politique ainsi que par le cadre infrastructurel et politique des transports. Cette thèse s’inscrit dans le cadre du projet TRANSITER, mené au Luxembourg, qui nous permet de tester des méthodes innovantes, comme le
développement d’une application smartphone afin de recueillir les opinions d’un éventail le plus large possible de citoyens. L’enquête quantitative sera complétée par l’emploi de méthodes qualitatives, notamment la réalisation d’entretiens auprès de différents acteurs de la politique des transports. Face au défi de la décarbonation des transports, les résultats de cette étude offriront des pistes d’actions aux décideurs publics pour mettre en œuvre une transition à la fois juste et démocratique.


Vers un indicateur d’accessibilité prenant en compte la qualité individuelle du temps de trajet

Jules Grandvillemin – Dir. Vincent Kaufmann & co-dir. Samuel Carpentier-Postel

La littérature sur l’accessibilité exprime souvent l’effort que les individus doivent fournir pour atteindre une destination en termes de rationalité instrumentale, à savoir le moins cher et le plus rapide. De ce point de vue, la qualité du temps perçu lors d’un voyage, par opposition à sa désutilité présumée, doit faire l’objet de recherches plus approfondies. Ce travail vise à mieux la comprendre afin de permettre l’intégration de raisons plus subjectives pour les facteurs d’entrave dans les mesures d’accessibilité. Pour ce faire, l’étude utilise une approche analytique qui considère les interrelations entre trois concepts clés (accessibilité, motilité et rythme) à travers le prisme de deux niveaux d’analyse : (1) les structures socio-spatiales (2) et les individus. En outre, trois conclusions établies constituent la base du projet : (i) Les indicateurs d’accessibilité doivent intégrer la logique de l’action, plus en phase avec les subjectivités individuelles, en intégrant les capacités des personnes à se déplacer, ce qui pourrait également donner un aperçu de leur capacité à gérer les contraintes de temps lorsqu’elles sont mobiles ; (ii) La nécessité de considérer les aspirations rythmiques des individus à travers le prisme des projets de mobilité (une des trois caractéristiques de la motilité) dans toute leur diversité et de déterminer les empreintes carbone associées ; (iii) La notion de qualité du temps doit être évaluée à travers le prisme des compétences des individus (une autre caractéristique de la motilité) pour discerner les conditions optimales de leur mobilité et si cela contribue à leur bien-être. Pour analyser ces résultats, nous nous appuierons principalement sur des méthodes mixtes pour comprendre ce qui fait la qualité du temps dans la mobilité. Une approche plus quantitative permettra de développer un indicateur d’accessibilité, qui intégrera la motilité et la qualité du temps sous la forme de pondérations dans les facteurs d’impédance pour relativiser l’effort associé aux variables temporelles telles que la durée du temps de déplacement. Les résultats de cette étude fourniront des indications précieuses sur l’intégration des subjectivités individuelles dans un indicateur d’accessibilité, qui peut être utilisé comme outil d’aide à la décision pour soutenir les mesures publiques au niveau des structures socio-spatiales qui pourraient promouvoir une accessibilité territoriale plus équitable sur le plan social et plus durable sur le plan écologique. L’outil développé à l’issue de cette recherche peut également être utilisé pour aider les individus à prendre en compte les critères qui facilitent la qualité du temps dans leur mobilité tout en améliorant leur aptitude à atteindre les destinations souhaitées.


Le sentiment d’insécurité comme facteur d’exclusion de l’espace public nocturne

Chloé Montavon – Dir. Vincent Kaufmann & co-dir. Sandra Mallet

La thèse porte sur le sentiment d’insécurité dans la ville, particulièrement la nuit, en tant que phénomène social. Elle s’appuie sur une démarche descriptive et compréhensive, prenant respectivement en considération les sens communs, mais également les dimensions matérielle et expérientielle de l’urbain. Ce projet est né de deux constats établis : (1) des processus d’exclusion se jouent dans l’espace public de nuit et sont communément associés à l’insécurité que peuvent ressentir certains groupes sociaux lorsqu’ils le fréquentent ; et (2) seules certaines insécurités font l’objet de réflexions publiques pour garantir un espace sûr, des arbitrages politiques sont donc effectués pouvant affecter certaines minorités sociales. Pour observer ces constats, nous nous intéresserons aux conditions d’activation du sentiment d’insécurité et des réponses à celui-ci. Nous porterons une attention particulière à la temporalité des situations, notamment à la nuit, celle-ci étant une scène propice à la mise en évidence d’inégalités entre les groupes sociaux. Pour réaliser cette enquête, nous nous appuierons sur une méthodologie aussi bien quantitative que qualitative, afin d’appréhender la thématique aux croisements de ses dimensions matérielles et expérientielles. Les résultats de cette recherche contribueront à éclairer la dimension sociale de l’espace public afin de soutenir des mesures publiques pour une ville plus inclusive.


Dépendance à la mobilité dans les régions rurales-urbaines : le cas de Creil et la Roche-sur-Foron

Maya El Khawand – Dir. Caroline Gallez (LVMT, Université Gustave Eiffel) & co-dir. Vincent Kaufmann 

Au cours des dernières décennies, l’amélioration des conditions de déplacement a entraîné des transformations socio-spatiales, notamment l’étalement urbain et l’augmentation des distances entre les logements et les lieux de travail. Ces changements spatiaux ont entraîné d’importantes inégalités sociales, telles que l’accès limité aux modes de déplacement rapide, qui dépend fortement de caractéristiques personnelles telles que l’âge, le revenu, le sexe, etc. (Geurs, Van Wee, 2014) ou à des lieux de résidence dotés de bonnes commodités ou de services de transport public efficaces. Ces deux transformations spatiales des zones urbanisées et la valorisation sociale de la mobilité ont entraîné un besoin accru de se déplacer plus fréquemment, parfois plus loin et plus vite (Kaufmann, 2008). Ce processus de ” dépendance à la mobilité ” se traduit par deux formes de préjudices pour les groupes sociaux précaires : un manque d’accessibilité pour ceux qui n’ont pas accès à la mobilité, ou des coûts financiers importants, des déplacements difficiles et plus longs pour les personnes mobiles mais fortement contraintes dans leurs déplacements (Fol, Gallez, 2017). 

Dans les années 1990, pour contrer les effets de la dépendance à la voiture et de l’étalement urbain, Peter Calthrope a développé la doctrine du ” Transit Oriented Development ” (TOD). Alors que ce modèle est principalement appliqué dans les zones urbaines denses, le projet européen TOD IS RUR, dont cette recherche fait partie, s’intéresse à la manière dont ce modèle de développement pourrait être étendu aux zones faiblement urbanisées. Dans cette thèse, nous nous intéressons à la capacité d’un modèle ferroviaire à modérer la dépendance à la mobilité dans les zones périurbaines et rurales, notamment pour les personnes à revenus modestes et en particulier les femmes. 

Cette thèse est basée sur une comparaison entre deux études de cas : Creil, une commune située aux limites extérieures de l’Ile de France. Elle est fortement dépendante de la métropole, ce qui se traduit par un taux élevé de déplacements quotidiens. La seconde étude de cas est la petite ville de “La Roche-sur-Foron”, située dans la périphérie française de la métropole de Genève et desservie par le nouveau chemin de fer Léman Express, l’infrastructure transfrontalière franco-suisse.